Seconde Guerre mondiale : recueillement en Pologne sur fond de polémique




es dirigeants d'une vingtaine de pays ont commémoré, mardi 1er septembre, le 70e anniversaire de l'invasion de la Pologne par l'Allemagne nazie, qui a marqué le début de la Seconde Guerre mondiale, sur fond de polémique sur le rôle de l'Union soviétique dans cette guerre. Une première cérémonie du souvenir a réuni les dirigeants polonais, diplomates et anciens combattants à 4 h 45 locales, heure précise à laquelle furent tirés il y a soixante-dix ans les premiers coups de canon de la Seconde Guerre mondiale, à Westerplatte, près de Gdansk.

"Nous sommes là pour rappeler qui dans cette guerre fut l'agresseur et qui fut la victime, car sans une mémoire honnête, ni l'Europe, ni la Pologne, ni le monde ne vivront jamais en sécurité", a déclaré le premier ministre polonais Donald Tusk. Parmi les dirigeants qui se sont recueillis ensemble dans l'après-midi au pied du monument aux victimes de Westerplatte figurent la chancelière allemande Angela Merkel, le premier ministre russe Vladimir Poutine, les premiers ministres français François Fillon, italien Silvio Berlusconi et suédois Fredrik Reinfeldt, aussi président en exercice de l'Union européenne.

Les rancœurs et interprétations divergentes de la Seconde Guerre mondiale entre Varsovie et Moscou ont laissé planer une ombre sur ces cérémonies. Le premier ministre polonais a rencontré mardi dans la matinée son homologue russe dont les déclarations étaient très attendues en Pologne après la publication ces derniers mois en Russie d'articles et d'un film justifiant le pacte germano-soviétique Molotov-Ribbentrop d'août 1939, qui a conduit au partage de la Pologne entre l'Allemagne et l'URSS. Après cette rencontre, M. Poutine a une nouvelle fois rejeté les critiques qui rendent ce pacte responsable du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.

"RUSSES ET POLONAIS SE SONT BATTUS CONTRE UN ENNEMI COMMUN"

"Nous voyons des tentatives persistantes de suggérer que le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale a été rendu possible exclusivement par le pacte Molotov-Ribbentrop", a déclaré M. Poutine lors d'une conférence de presse conjointe avec M. Tusk. Selon M. Poutine, "tout ce qui a conduit à la tragédie du 1er septembre 1939 doit être étudié pour que cela ne se répète plus jamais". Le pacte germano-soviétique "fut le dernier d'une série de documents, alors que tout le monde avait commis des erreurs", a-t-il dit. Il a cité plusieurs accords antérieurs ayant permis, selon lui, le conflit, dont le traité de Munich. Il a aussi rappelé la participation de la Pologne au dépeçage de la Tchécoslovaquie en 1938, et un pacte de non-agression polono-allemand de 1934.

Le premier ministre russe s'est en même temps montré conciliant, soulignant que "Russes et Polonais s'étaient battus contre un ennemi commun pendant la guerre" et que les Russes "avaient considéré les Polonais comme des frères d'arme". M. Tusk a déclaré, quant à lui, que les Polonais ne voulaient "utiliser contre quiconque" le souvenir de la double invasion allemande et soviétique de son pays en septembre 1939. "Seule la recherche de la vérité peut nous permettre de bâtir la confiance", a-t-il encore déclaré.

Selon le premier ministre polonais, "deux totalitarismes avaient décidé du sort de cette guerre, d'abord en alliés, ensuite en ennemis". Des sujets d'irritation persistent aussi avec l'Allemagne. Avant son départ pour Gdansk, Mme Merkel a souligné que l'Allemagne avait "causé des souffrances incommensurables dans le monde" mais a aussi qualifié d'"injustice" l'expulsion des Allemands de Pologne après la défaite nazie. Le souvenir de la Seconde Guerre mondiale reste particulièrement vivant en Pologne. Entre 5,6 et 5,8 millions de citoyens polonais, dont quelque 3 millions de juifs, ont trouvé la mort durant ce conflit, selon les calculs récents.