Haïti-désatre: le tremblement de terre qui a ravagé Port-au-Prince




Le tremblement de terre qui a dévasté Haïti mardi 12 janvier en fin d'après-midi a été d'une extrême violence. Selon l'Institut américain de géophysique, le pays n'avait pas subi une secousse d'une telle puissance depuis le milieu du XVIIIe siècle. Selon les premières estimations de responsables d'ONG, la catastrophe pourrait avoir causé des milliers de morts dans cet Etat parmi les plus pauvres du monde.

De nombreux édifices ont été détruits dans la capitale, Port-au-Prince, plongée dans une situation chaotique. Les rues de la ville sont jonchées de cadavres, et les pillards se sont vite mis à l'oeuvre dans les supermarchés dévastés. Et les inquiétudes étaient fortes concernant la situation de Cité Soleil, l'un des principaux bidonvilles, situé au nord de la capitale (300 000 habitants).

Les communications téléphoniques et l'électricité ont été coupées, ajoutant à la panique générale. La plupart des stations de télévision ne fonctionnent plus et quelques rares radios émettent des appels d'urgence. L'acheminement des blessés dans les hôpitaux encore debout est rendu quasiment impossible. Les survivants erraient dans la capitale, préférant passer la nuit dehors de peur d'un nouveau séisme. Utilisant des lampes torches, beaucoup se mobilisaient pour déblayer les décombres et porter secours aux personnes ensevelies.

L'épicentre de la première secousse, de magnitude entre 7 et 7,3, a eu lieu à 16 h 53 (21 h 53 GMT) dans la banlieue de Carrefour, à 15 kilomètres à l'ouest de la capitale surpeuplée. Elle a été suivie de plusieurs répliques, qui ont prolongé l'affolement des habitants. La violence du séisme a été telle qu'il a été ressenti vers l'ouest jusqu'à Santiago de Cuba et vers l'est sur une grande partie du territoire dominicain. Lancée dans les minutes qui ont suivi le tremblement de terre, une alerte au tsunami a été levée en début de soirée. Les autorités dominicaines n'ont fait état d'aucune victime ni d'aucun dégât majeur.

De nombreux bâtiments, dont le palais national, plusieurs ministères, le Parlement, la cathédrale, le palais de justice, des établissements universitaires, des centres hospitaliers se sont écroulés, selon les témoignages de journalistes haïtiens joints au téléphone. Selon le frère du premier ministre, Jean-Max Bellerive, le président René Préval, son épouse Elisabeth Delatour et tous les membres de son gouvernement seraient sains et saufs.

Plusieurs des principaux hôtels de la capitale, comme le Montana, ont également été détruits. 200 personnes qui y résidaient seraient portées disparues. Installé à l'Hôtel Christopher, le quartier général de la Mission de stabilisation des Nations unies en Haïti (Minustah) a souffert d'importants dégâts. La Minustah compte quelque 9 000 policiers et militaires qui participaient aux secours dès mercredi à l'aube. Evoquant "une catastrophe majeure", l'ambassadeur d'Haïti à Washington, Raymond Joseph, a lancé un appel urgent à l'aide internationale au micro de la chaîne de télévision CNN. Le président américain Barack Obama a rapidement annoncé l'envoi de "toute l'aide nécessaire" dont Haïti aura besoin. Le commandement sud du Pentagone, basé à Miami, a été chargé d'évaluer les besoins et d'acheminer le plus vite possible l'aide humanitaire.

Le Canada, la France, le Venezuela et la République dominicaine ont également annoncé l'envoi de secours. Paris a décidé d'envoyer 130 sapeurs-pompiers ou sauveteurs, qui devaient rejoindre Port-au-Prince dès jeudi soir. Près de 1 500 Français résident en Haïti, dont 1 200 à Port-au-Prince. Selon le secrétaire d'Etat à la coopération Alain Joyandet, une soixantaine d'entre eux étaient réfugiés à l'ambassade.

La Banque interaméricaine de développement (BID) a débloqué une aide d'urgence de 200 000 dollars (138 000 euros) devant permettre de fournir de l'eau, des vivres, des médicaments et des abrix aux victimes. De son côté, la Banque mondiale, dont les bureaux situés dans la banlieue de Port-au-Prince ont été détruits , a indiqué qu'elle commençait à travailler sur des projets de reconstruction, et qu'elle était prête à mobiliser une aide sans en préciser encore le montant.

Le programme alimentaire mondial (PAM) a décidé de faire partir deux avions, son porte-parole expliquant "que la nourriture a une importance vitale surtout à partir des deuxième et troisième jours". L'ampleur de la mobilisation internationale sera cruciale dans ce pays dépourvu de tout pour secourir les victimes.


Jean-Michel Caroit et AFP
Le siège de l'ONU s'est effondré
Le siège de la mission de l'ONU en Haïti (Minustah), un bâtiment de cinq étages où plus de 200 fonctionnaires onusiens travaillent en temps normal, s'est effondré dans le tremblement de terre. Selon le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Alain Le Roy, il restait, à l'heure du séisme, aux alentours de 17 heures, "un grand nombre de personnes" et "il y a forcément des morts en nombre très important".

Des casques bleus brésiliens présents sur place essayaient sans succès, mardi soir, d'extraire des survivants. On était aussi sans nouvelles du chef de la Minustah, le diplomate tunisien Hédi Annabi. Selon des sources onusiennes, des casques bleus ont rapporté des actes de pillage. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit "très inquiet pour le peuple haïtien et les nombreux employés de l'ONU qui vivent sur place". La mission de l'ONU est composée de près de 11 000 personnes, dont 7 000 casques bleus et 2 000 policiers.