Quatrième jour de paralysie du trafic aérien en Europe


LONDRES (Reuters) - Le trafic aérien restera paralysé ce dimanche, pour le quatrième jour, sur la majeure partie du continent européen où un énorme nuage de cendres volcaniques continue de se propager.

Plus de trois vols sur quatre ont dû être annulés samedi, bloquant des dizaines de milliers de voyageurs.

De nombreux pays ont fermé leur espace aérien jusqu'à dimanche, voire lundi, et les météorologues prévoient que le nuage ne se déplacera guère d'ici là. Certains estimaient même qu'il pourrait devenir plus dense mardi et mercredi et menacer encore plus le transport aérien.

Le nuage, mélange de particules abrasives qui se déplace dans la haute atmosphère où il représente un sérieux danger pour les moteurs et les fuselages des avions, coûte aux compagnies aériennes plus de 200 millions de dollars par jour.

Des vols d'essai sans passagers ont été organisés samedi par les compagnies aériennes KLM et Lufthansa, qui ont fait savoir que leurs appareils ne semblaient pas avoir été endommagés par les cendres volcaniques en provenance du volcan islandais situé sous le glacier Eyjafjallajokull, entré en éruption mercredi.

La compagnie néerlandaise KLM espère, s'il se confirme par des examens plus poussés que ces vols ont été concluants, faire revenir sept appareils d'Allemagne vers Amsterdam dimanche et obtenir la permission de reprendre partiellement ses opérations.

"Tous les avions ont été inspectés à leur arrivée à Francfort et il n'y avait pas de dommage sur les vitres du cockpit ou le fuselage ni d'impact sur les moteurs", a déclaré pour sa part Aage Dünhaupt, porte-parole de la Lufthansa.

COMBIEN DE JOURS ?

Jamais depuis les attentats du 11 septembre 2001 à New York et Washington le trafic aérien n'avait été aussi perturbé. L'espace aérien des Etats-Unis avait alors été fermé pendant trois jours et les compagnies européennes avaient annulé tous leurs vols transatlantiques.

L'agence européenne de contrôle aérien Eurocontrol a estimé le nombre de vols à 5.000 samedi, contre 22.000 en période normale. Il y en avait eu 10.400 vendredi contre 28.000 habituellement.

Le nuage de cendres a aussi eu des conséquences diplomatiques, bon nombre de dirigeants ayant annulé leur participation aux obsèques de l'ancien président polonais Lech Kaczynski, dimanche à Cracovie.

Le président américain Barack Obama, son homologue français Nicolas Sarkozy, la chancelière allemande Angela Merkel, bloquée en Italie, ont dû renoncer à se rendre en Pologne.

En Islande, l'éruption volcanique semblait perdre en intensité samedi mais elle pourrait se prolonger des jours, voire des mois selon les autorités.

L'organisation météo américaine AccuWeather a indiqué que le nuage se trouvait dans une zone de vents faibles et qu'il était donc peu probable qu'il se déplace beaucoup lundi.

"Le nuage devrait devenir plus concentré mardi et mercredi, et menacer davantage le transport aérien. Ceci dit, il devrait également devenir plus étroit et affecter une zone plus réduite", indiquait AccuWeather, qui prévoit pour jeudi des vents venus de l'Atlantique qui pourraient dissiper le panache de cendres.

La Grande-Bretagne, le Danemark et l'Allemagne, entre autres, ont fermé leur espace aérien pour toute la journée de samedi. La Grande-Bretagne a prolongé cette mesure jusqu'à dimanche 18h00 GMT.

PAGAILLE EN ASIE

En France, les 26 aéroports situés au nord d'un axe Nantes-Lyon, dont les trois parisiens - Roissy, Orly et Le Bourget - devaient interrompre leur trafic jusqu'à lundi matin 8h00.

Les aéroports de Grenoble et Bordeaux ont également fermé à partir de samedi 16h00 et ceux de Nice et Marseille fermeront dimanche à partir de 6h00, a annoncé la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) samedi soir.

L'Italie a prolongé la fermeture des aéroports du nord du pays. Aux Pays-Bas, la fermeture court jusqu'à ce dimanche matin, en Suisse jusqu'à dimanche 12h00 GMT.

Si le nuage de cendres ne perturbe pas les vols pendant des semaines, ce qui menacerait l'approvisionnement des usines, les économistes ne s'attendent pas à ce qu'il ralentisse très sensiblement la fragile sortie de récession de l'Europe.

La pagaille s'est étendue à l'Asie, où des dizaines de vols à destination de l'Europe ont été annulés tandis que les hôtels, de Pékin à Singapour, étaient assaillis par des milliers de voyageurs bloqués en divers pays.

Environ 84% des vols de compagnie américaines à destination ou en provenance d'Europe ont été annulés samedi.

L'armée américaine a elle aussi dû dérouter de nombreux vols, notamment ceux qui permettent d'évacuer les blessés d'Afghanistan et d'Irak, a indiqué un porte-parole du Pentagone.

L'Eyjafjallajokkul est entré mercredi en éruption pour la deuxième fois en un mois, projetant un panache de cendres entre 6.000 et 11.000 mètres d'altitude.

Samedi, les particules de verre et de roche volcanique étaient retombées entre 5.000 et 8.000 mètres.

"L'éruption peut continuer longtemps comme ça", a prévenu Bergthora Thorbjarnardottir, géophysicienne des services météorologiques islandais.

"Mais tous les volcans sont différents et nous n'avons pas beaucoup d'expérience avec celui-ci. Cela fait 200 ans qu'il n'était pas entré en éruption", a-t-elle ajouté.

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Source: www.lemonde.fr